Méthamphétamine, développement durable, essais nucléaires : de quoi va parler Manuel Valls en Polynésie du 15 au 22 juillet ?

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Méthamphétamine, développement durable, essais nucléaires : de quoi va parler Manuel Valls en Polynésie du 15 au 22 juillet ?

Le ministre des Outre-mer va effectuer la première visite en Polynésie de son mandat du 15 au 22 juillet. Des déplacements dans les îles de Hiva Oa, Rangiroa, Moorea, et même Rurutu sont prévus, en plus des rencontres institutionnelles, visites d’acteurs économiques, des forces de sécurité ou des rendez-vous culturels. Sur le fond, le discours se concentrera sur les investissements et aides de l’État en matière d’infrastructures, d’environnement, de développement durable, de sport ou de formation. Manuel Valls a annoncé, depuis Paris, qu’il parlerait aussi de nucléaire et surtout de sécurité et de méthamphétamine, sujets sur lesquels il se sait très attendu. Explications de notre partenaire Radio 1 Tahiti. 

Il faut « refonder la relation entre l’Hexagone et ses territoires ultramarins ». C’est ce qu’a déclaré Manuel Valls au sortir d’un Conseil interministériel des Outre-mer qui s’est tenu à Paris ce jeudi matin. Une doctrine que l’ancien Premier ministre, nommé en décembre dernier ministre d’État et ministre des Outre-mer dans le gouvernement de François Bayrou, appliquera peut-être à la Polynésie lors de sa visite prévue la semaine prochaine, du mardi 15 au mardi 22 juillet.

Une semaine de déplacement promise dès le début de son mandat, un temps prévu pour avril, puis pour le mois de mai, et à chaque fois décalée sous contrainte de l’actualité nationale et ultramarine. Depuis sa nomination Manuel Valls s’est beaucoup concentré sur le dossier de la reconstruction de Mayotte, dévastée en fin d’année dernière par le cyclone Chido, et sur la crise politique et économique en Nouvelle-Calédonie, dossier brûlant qui fait toujours l’objet de négociations sous l’égide de l’Élysée.

Comme à chaque déplacement ministériel, le programme précis va rester en mouvement jusqu’au dernier moment. Mais on sait déjà que Manuel Valls, attendu le mardi 15 juillet en début de soirée à Tahiti-Faa’a, débutera sa visite par une journée de rencontres institutionnelles à Tahiti, le mercredi 16.

Présidence, assemblée… Le ministre se rendra aussi à la base aérienne, en plein renouvellement de sa flotte de Falcon, et à la base navale, pour une visite le nouveau patrouilleur Teriieroo a Teriierooiterai qui attend toujours son sistership. Il a en outre rendez-vous avec le RSMA pour la passation de commandement entre le colonel Frédéric Gerlinger et son successeur Guillaume Nicloux.

Marquises, Tuamotu, Australes

Le ministre d’État -un titre protocolaire qui le place en numéro 3 du gouvernement Bayrou derrière le Premier ministre lui-même et la ministre de l’Éducation nationale Elizabeth Borne- est ensuite attendu aux Marquises. Plus précisément à Hiva Oa, où Emmanuel Macron avait été reçu avec faste en 2021, et où Gérald Darmanin et Philippe Vigier avaient déjà fait un détour en 2023. Tous les élus de la Codim devraient être réunis sur place, pour échanger sur leur volonté de développement et d’autonomie de l’archipel, sur les projets d’investissement, notamment sur l’aéroport de Nuku Hiva, le rayonnement culturel, au travers des sites classés à l’Unesco…

Manuel Valls, après une nuit à Hiva Oa jeudi soir, doit ensuite passer la journée de vendredi 18 juillet sur l’atoll de Rangiroa -le 2ème plus grand atoll au monde-, entre autres pour inaugurer des abris de survie -un programme d’investissement État-Pays qui touche à sa fin et qui sera peut-être renouvelé-, parler de l’activité perlicole, touristique, et des autres opportunités de développement aux Tuamotu. Suivra, le lendemain, et après un retour à Tahiti, une visite à Moorea, où l’ancien Premier ministre est attendu, entre autres, par Coral Gardeners, le Fare Natura, et le Criobe, avant un détour par la place To’ata à Papeete, pour vivre les dernières heures du Heiva i Tahiti, grand festival culturel annuel.

Enfin, un déplacement, un peu plus inédit, est prévu à Rurutu, dans l’archipel des Australes, entre dimanche 20 et lundi 21 juillet, probablement pour parler de soutien au développement durable -l’État déploie depuis 2023 un important Fonds Verts qui finance beaucoup de projets des îles, notamment en matière d’énergie-, et pourquoi pas de protection des océans et d’aires marines protégées, des sujets qui étaient au centre de la conférence des Nations unies de Nice début juin. D’autres séquences -avec les forces de l’ordre, auprès de la filière pêche, au musée de Tahiti…- sont prévues entre lundi soir et mardi soir, date de départ du ministre des Outre-mer. 

La méthamphétamine est bien au programme

La visite sera donc centrée, comme c’est l’objet principal de ce genre d’exercice dans la collectivité autonome de Polynésie, sur la mise en valeur l’action de l’État mais aussi ses investissements et aides sur les compétences qui relèvent du Pays et des communes. Surveillance de la ZEE, mais aussi développement économique, environnement, énergie avec le travail lancé, après des demandes de Moerani Frebault, sur la péréquation nationale et le coût de l’électricité en Polynésie…

Les questions de sécurité seront aussi largement abordées -elles ont été au centre du conseil interministériel, mais avec un focus plus marqué sur les Antilles et les autres DROM- ainsi que celle de la méthamphétamine. Le gouvernement parisien a été saisi par l’exécutif de Moetai Brotherson et par une résolution de l’assemblée, pour augmenter la répression et les quantums de peines pour les trafiquants. Des demandes pour l’instant sans réponse.

Mais le sujet de l’ice, nom local donné à cette drogue de synthèse importée des États-Unis ou du Mexique par avion ou sur des bateaux, a bien été évoquée lors du conseil interministériel et il sera sérieusement discuté à Papeete, comme l’a confirmé le ministre depuis Paris après une question d’Outremers360 : « d'agir avec les forces politiques, avec la justice, avec les forces de sécurité intérieures sur place, dans le cadre d'une coopération aussi avec les États-Unis ». « J'aurais l'occasion de voir avec les élus polynésiens quels sont les moyens que nous pouvons mettre en œuvre », a-t-il assuré.

Le programme de la visite laisse aussi entrevoir des discours sur le soutien de l’État aux Jeux du Pacifique et aux infrastructures sportives -le pôle de combat de Punaruu doit notamment être inauguré- sur la formation, notamment du côté maritime et agricole, la culture, la pêche, ou encore la politique de l’eau, grand défi des communes côté potabilisation comme assainissement.

Le nucléaire discuté, pas la convention santé

Manuel Valls, après la publication du rapport de la commission d’enquête sur le nucléaire, qui a suscité du débat à Paris et que sa rapporteure, la députée Merehana Reid-Arbelot, a officiellement remis au ministre par plus tard que ce jeudi, ne pourra pas échapper au sujet du nucléaire, que ce soit du côté des systèmes d’indemnisation, du remboursement de la dette CPS ou des questions de mémoire et de recherche.

Les autres sujets de santé, qui font pourtant l’objet d’importants débats entre l’État et le Pays, et entre les élus polynésiens ces derniers mois, ne feront pas l’objet d’une séquence particulière, même s’ils seront discutés entre Moetai Brotherson et Manuel Valls. Il faut dire que la Polynésie doit aussi recevoir, d’ici la fin de l'année, le ministre national de la Santé Yannick Neuder, qui devrait, lui arriver, avec des annonces, ou procéder à des signatures dans son domaine de compétence.

La grande inconnue reste la question du statut et de la décolonisation, que le parti indépendantiste Tavini Huira’atira est bien décidé à imposer au programme de la visite avec ses sit-in devant le temple protestant de Paofai et la cathédrale de Papeete dès le mercredi 15 juillet. Difficile pour un ministre des Outre-mer de s’exprimer sur le respect par la France des résolutions de l’ONU, un sujet plutôt débattu au Quai d’Orsay ou à l’Élysée. 

Mais le fait est que Manuel Valls, avec sa proposition de souveraineté avec la France en Nouvelle-Calédonie, ou encore l’éventualité d’un États associé prononcée par Emmanuel Macron lors des négociations calédoniennes, sans compter l’évolution statutaire en Guyane et les nombreuses remarques du ministre sur la nature du lien entre la France et ses territoires ultramarins, semble des plus investis sur le sujet.

Charlie René pour Radio 1 Tahiti