Nouvelle-Calédonie : le plan de réformes du gouvernement adopté au Congrès dans la douleur

©Baptiste Gouret / LNC

Nouvelle-Calédonie : le plan de réformes du gouvernement adopté au Congrès dans la douleur

Le texte, censé garantir le rétablissement des comptes publics d’ici trois ans, a été adopté ce jeudi au Congrès calédonien, après plusieurs heures de débats particulièrement houleux. L’État avait conditionné le versement de la seconde tranche du prêt octroyé à la Nouvelle-Calédonie à l’adoption de ce vaste programme de mesures. Un sujet de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.

Cinq heures de débats, le dépôt d’une motion préjudicielle finalement retirée, plusieurs suspensions de séances et des amendements de dernière minute. Il aura fallu beaucoup d’efforts à l’exécutif et ses soutiens pour permettre au plan de réformes du gouvernement d’être adopté, ce jeudi 14 août. Entamé en début d’après-midi, l’examen du texte s’est achevé à 19h30 par le vote à une courte majorité des membres du Congrès.

Fruit de plusieurs mois de concertation avec les partenaires sociaux et les groupes politiques, ce texte central pour le gouvernement Ponga comporte une cinquantaine de mesures visant à rétablir l'équilibre des comptes sociaux d’ici 2028 et de garantir une relance de l’économie. Il prévoit notamment une réduction importante des dépenses publiques, de l’ordre de 19 milliards de francs par an.

« Braquage social »

Un programme loin de faire l’unanimité. L’opposition a en effet dénoncé une importante cure d’austérité que les Calédoniens devront supporter, dans un contexte économique encore très dégradé.

Vaimu’a Muliava, de l’Éveil océanien, l’a qualifié de « braquage social ». « Nous ne pouvons pas le cautionner, il ne correspond pas à notre vision ». Philippe Gomès, de Calédonie ensemble, a quant à lui évoqué une « attaque en règle contre les familles calédoniennes, au moment même où 25 % des emplois ont été détruits et où les systèmes de chômage s’éteignent progressivement ».

Dans le viseur des opposants au texte, plusieurs mesures phares telles que la réduction des allocations familiales, dont seront privés 4 600 ménages aux revenus supérieurs à 6,9 millions par an, ou encore la réduction de 10 % de la prise en charge du Ruamm. Des « économies sur les classes moyennes et les familles les plus défavorisées », estime le chef de file de Calédonie ensemble.

Des critiques déjà formulées le matin même par La Fédé, qui a réuni une cinquantaine de ses adhérents devant le Congrès, pour dénoncer un programme « injuste » visant à « prendre aux plus pauvres pour donner aux entreprises ». Il prévoit en effet la baisse de 5 points de l’impôt sur les sociétés.

Pour convaincre les membres du Congrès, l’exécutif et la coalition Les Loyalistes-Rassemblement ont insisté sur la nécessité de mettre en œuvre ces réformes pour bénéficier du soutien financier de l’État. Celui-ci a en effet conditionné le versement de la seconde tranche de son prêt garanti, soit 28 milliards de francs, à l’adoption de ce plan. C’est l’engagement qu’avait pris le président du gouvernement, Alcide Ponga, lors de la signature d’une convention avec le ministre des Outre-mer, en mars.

Sans cette nouvelle aide de Bercy, « tout notre système se casse la figure », a averti Thierry Santa, membre du gouvernement en charge du budget. D’autant que les recettes fiscales de 2025 devraient « être encore plus basses que ce qu’on avait estimé au vote du budget primitif, de l’ordre de quatre à cinq milliards de moins », a souligné ce dernier.

Ralliement de l’UNI

Un argumentaire qui ne semblait toutefois pas suffire à dégager une majorité derrière ce projet de délibération. Ce n’est qu’au terme d’une énième suspension de séance que la solution a été trouvée par les groupes Rassemblement et Les Loyalistes, à travers le dépôt d’un amendement portant création d’un comité de suivi du plan de réformes composé du président du congrès, du président du gouvernement, des chefs de groupes politiques du congrès et des présidents des assemblées de province.

De quoi rassurer une partie des élus récalcitrants, en particulier ceux de l’Union pour l’indépendance, en leur assurant la possibilité d’amender le plan et d’en modifier certaines mesures. Le ralliement de ces derniers a garanti au gouvernement l’adoption du plan, adopté à 25 voix pour (Rassemblement-Les Loyalistes et UNI) et 21 contre (UC-FLNKS et Nationalistes, Calédonie ensemble et Éveil océanien). « C’est une très bonne chose pour les Calédoniens », a réagi Christopher Gygès, membre du gouvernement en charge de l’économie, au terme de la séance. « Le débat vaut plus que des postures politiques. »

Reste que ce projet de délibération voté ce jeudi est, en réalité, une simple déclaration d’intention. Les mesures qu’il contient seront en effet examinées individuellement par les membres du Congrès. Certaines ont d’ailleurs déjà été adoptées par l’hémicycle, comme l’instauration d’un jour de carence dans la fonction publique ou la transformation de l’allocation de chômage partiel.

Baptiste Gouret pour Les Nouvelles Calédoniennes