Avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie: l’Éveil océanien plaide en faveur d’un "avenant" à l’accord de Nouméa

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Avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie: l’Éveil océanien plaide en faveur d’un "avenant" à l’accord de Nouméa

Sans surprise, l’Éveil océanien, réuni ce samedi 17 mai en congrès à Païta, s’est dit favorable à la proposition de souveraineté partagée avec la France de Manuel Valls lors du "conclave" de Deva, que le parti juge être, à terme, la "solution finale" pour régler la question de l’avenir institutionnel. Mais au vu de l’échec de ces négociations, le mouvement propose une autre option : l’avenant à l’accord de Nouméa (ADN) qui permettrait de prolonger ces dispositions pour apporter paix et stabilité au pays avant de proposer un référendum de projet d’ici une quinzaine d’années. Explications avec notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
 

Souveraineté partagée ou en partenariat, État associé… Qu’importe son appellation, la proposition mise sur la table des négociations par le ministre des Outre-Mer Manuel Valls, lors du "conclave de Déva", est de loin l’option privilégiée par l’Éveil océanien pour aboutir à un avenir institutionnel viable et mettre ainsi un point final à l’histoire coloniale du Caillou.

Sauf que de l’aveu même du parti, réuni en congrès ce samedi 17 mai à Païta, un tel scénario semble difficile à mettre en place dans l’immédiat. "On a toujours été clair puisque dès 2022, on avait présenté notre projet de partenariat programmé en 2053. On est donc favorable à la souveraineté avec la France, mais elle ne peut pas se mettre en place maintenant parce que ce serait ne pas respecter les résultats des trois consultations référendaires, pose d’emblée Milakulo Tukumuli, pour qui cette proposition sera la "solution finale" pour le pays puisqu’elle permet de "concilier la volonté de maintenir un lien fort avec la République et la volonté d’émancipation et de souveraineté". Un scénario qui rejoint ainsi le fameux slogan du parti "Non (à l’indépendance), pas maintenant", mais "oui, un jour".

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Sauf qu’en l’absence d’accord à l’issue du "conclave" de Deva, un compromis doit être trouvé. Dans ce contexte, l’Éveil océanien reste ouvert, dans un premier temps du moins, à la proposition de fédéralisme, portée par les Loyalistes et Le Rassemblement. Mais à la seule condition qu’elle n’aboutisse pas à des statuts différents entre les provinces et donc à une "partition politique, économique, sociale et ethnique" de la Nouvelle-Calédonie qui équivaudrait à "créer un mur" entre les populations. Et en tous les cas, cette solution ne pourrait, selon le mouvement, qu'être "transitoire".

Un référendum de projet en 2040 ?

C’est pourquoi l’Éveil océanien plaide en faveur d’une troisième option à débattre et adopter au plus vite en vue de trouver un accord dans les prochaines semaines : "l’ADN", à savoir "l’avenant sur l’accord de Nouméa", qui permettrait de prolonger en quelque sorte cette période pour apporter de la stabilité, de la paix. Ce compromis vise à reconstruire le pays, en vue de proposer un nouveau référendum, mais de projet cette fois-ci.

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En clair, au bout d’une quinzaine d’années par exemple, les Calédoniens seraient appelés à se prononcer en faveur d’une souveraineté partagée, aussi appelée État associé avec la France ou pour le maintien ou l’instauration d’un État fédéré à la France. Une manière de sortir de la logique binaire des trois précédentes consultations.

"Depuis le départ de Valls, je trouve qu’on est parti de positions très éloignées (entre loyalistes et indépendantistes, N.D.L.R.) pour finalement arriver avec deux projets que sont l’État fédéré et l’État associé. Or je considère que politiquement, économiquement et socialement, ces deux projets sont proches. Il existe une feuille de papier de cigarette entre les deux, analyse Milakulo Tukumuli. Maintenant, il faut remplir chacun de ces projets. Et c’est ce que les mouvements politiques doivent faire car on ne doit pas opposer les questions. On doit demander aux Calédoniens de choisir entre l’un ou l’autre."

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Pour l’Éveil océanien néanmoins, seul l’État associé, dans lequel de nombreuses compétences régaliennes sont encore déléguées à Paris (monnaie, défense, justice) ne pourra régler "définitivement" la question de l’avenir institutionnel. 

Un cheminement jugé essentiel pour pouvoir s'attaquer véritablement aux mots qui gangrènent la société calédonienne. "Si on règle cette question et qu’on parvient à sortir le oui et le non du paysage politique, on a coupé l’arbre qui cache la forêt de tous nos problèmes. Cela permet de nous concentrer sur les vraies problématiques de notre pays que sont l’alcool, la violence intrafamiliale, le chômage, la fiscalité, l’aide médicale, etc. liste le leader de l’Éveil océanien. Il faut être innovant, il faut imaginer une sortie qui soit différente."

C’est pourquoi le bureau du parti se "battra jusqu’au bout" afin que sa proposition d’ADN, qu’il a défendue seul au "conclave" de Deva, puisse emporter l’adhésion de l’ensemble des forces politiques en vue d’aboutir à un accord. Sans quoi la Nouvelle-Calédonie "continuera de couler" jusqu’à sombrer dans la "faillite".

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"On va entendre des horreurs"

Un défi que relève volontiers Milakulo Tukumuli, réélu ce samedi matin président du parti pour une période de trois ans. "L’avenant à l’accord de Nouméa est le plus petit accord et la dernière solution que nous puissions encore trouver", martèle-t-il, espérant par là-même pouvoir décaler les élections provinciales à 2026. Si on n’a pas d’accord et qu’on organise ce scrutin (avant le 30 novembre, N.D.L.R.), on va entendre des horreurs. Manuel Valls a d’ailleurs conscience que si on convoque les élections provinciales dans ce contexte, ça va être très difficile. On va être dans un abîme à la fois politique, économique et sociale, ce qui peut engendrer une révolte dans le pays."

Par Les Nouvelles Calédoniennes