C’est une première pour le Pacifique Sud : cette année, une vingtaine de porteurs de projets venus de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française, des Fidji ou encore des Îles Cook, réunis sous la bannière “Village Pacific Tech”, participent à l’un des plus grands événements mondiaux de l’innovation : VivaTech. Du 11 au 14 juin 2025, startups, géants de la tech, investisseurs et acteurs publics se sont retrouvés, comme chaque année, pour échanger, innover, se connecter, du côté de la Porte de Versailles, à Paris. Au sein de cette délégation du Pacifique, l’association Gardiens des îles repartira en Nouvelle-Calédonie particulièrement satisfaite de cette première participation. Contacts, solutions technologiques, nouvelles perspectives… Malik Oedin, président de la structure au service de la biodiversité, ne repart pas les mains vides.
Au Hall 2 du parc des expositions de la Porte de Versailles, le « Village Pacific Tech » se dresse fièrement dans son espace de plus de 50 m². À l’occasion de cette nouvelle édition de VivaTech, le salon de l’innovation où se croisent startups, géants technologiques et chercheurs, Malik Oedin, président de l’association Gardiens des îles, est venu à la rencontre de ceux qui pourraient l’aider à protéger les îles de son territoire, ainsi que leur biodiversité, leurs savoirs. « On est au troisième jour, et c’est vraiment très enrichissant », expliquait-il ce vendredi 13 juin. « On a pu rencontrer d’une part des gens qui seraient prêts à mettre à disposition leurs outils au service de notre association et à mettre en place des partenariats. » Parmi les solutions repérées sur les stands du salon, certaines pourraient transformer la façon dont les Gardiens des îles travaillent au quotidien : « Que ce soit, par exemple, des outils qui vont nous permettre de détecter les espèces envahissantes, comme des caméras intelligentes… ou des outils qui vont nous permettre de faire des analyses spatiales. Pour pouvoir, par exemple, prendre en compte l’érosion du trait de côte dans le cadre de l’aménagement du littoral ou des îlots. »
VivaTech, le rendez-vous de l’innovation, devient ici facilitateur de connexions institutionnelles. « On a pu rencontrer, par exemple, des acteurs très importants pour nous, comme l’ambassadrice de France dans le Pacifique. On a vu aussi des partenaires qui sont plus sur des outils en faveur des savoirs traditionnels et des langues autochtones. Pour pouvoir valoriser les savoirs locaux dans le cadre de la conservation de la biodiversité. » Pour Malik Oedin, cette première participation aura donc été à la hauteur de ses espérances.


Trois projets majeurs en 2025
Pour l’association Gardiens des îles, cette participation au Salon Viva Technology s’inscrit dans un agenda riche. L’association, active depuis 7 ans, entre en effet dans une année charnière, marquée par le lancement de trois projets structurants pour la Nouvelle-Calédonie et la région mélanésienne. D’abord avec cette première action qui concerne la gestion concertée des îlots sur la commune de Païta, au nord de Nouméa, s’inscrivant dans la continuité des missions fondatrices de l’association. « Notre objectif, c’est de concilier les usages et la préservation de la biodiversité », explique Malik Oedin. « Donc permettre aux citoyens de devenir acteurs aussi sur la préservation du lagon. » Ce projet vise à redonner une place centrale aux habitants dans la régulation de la fréquentation des îlots, la sensibilisation, et la participation directe à la surveillance écologique.
Le deuxième projet, mené en partenariat avec le Muséum national d’Histoire naturelle, explore une autre voie : celle de la science citoyenne. « C’est un projet sur comment les gens peuvent aider à collecter des données sur la biodiversité et comment ça peut leur servir eux-mêmes à gérer leur environnement. » Ici, le but est double : produire de la donnée utile aux scientifiques tout en rendant cette connaissance accessible et actionnable pour les populations locales. « L’idée est de former des bénévoles, des jeunes, des familles, pour qu’ils participent à des protocoles simples de recensement, d’observation, de veille. Une écologie partagée, vécue, transmise. »
Enfin, le troisième projet vise à mettre en place la toute première étude sur la gestion coutumière et communautaire de la biodiversité terrestre en Mélanésie. « Ce sera la première étude sur la gestion coutumière et communautaire de la biodiversité en Mélanésie sur le milieu terrestre.» Ce chantier inédit entend documenter, valoriser et renforcer les pratiques coutumières liées à l’environnement : des règles de prélèvement en passant par les temporalités liées aux cycles naturels. Il s’agit de croiser les savoirs traditionnels avec les outils scientifiques contemporains. « C’est tout le but de cette association lancée en 2018 : concilier les usages qui sont faits par les plaisanciers et la préservation de la biodiversité sur les îlots du lagon de la Nouvelle-Calédonie, au départ... Puis, petit à petit, mettre en place des actions de restauration écologique, des actions de suivi de l’environnement, des études scientifiques… Le but est aussi de se développer pour pouvoir pérenniser des emplois, avoir un réel impact… »



« Transformer l’essai »
Si VivaTech a été une vitrine, pour l’association Gardiens des îles, c’est surtout un point de bascule. « L’idée, ça va être de transformer l’essai, de revenir vers les personnes qu’on a rencontrées », indique le président, satisfait des connexions qui se sont faites aussi au sein de sa propre délégation. « Même pour certains acteurs en Nouvelle-Calédonie, c’était la première fois qu’on se rencontrait au sein du Pacific Tech Village. L’idée est de pouvoir continuer à échanger pour pouvoir se structurer et mettre en place des projets communs. » La suite est déjà en marche. « On continue de s’entraider entre nous pour identifier les différents intérêts qu’on peut avoir avec d’autres start-up ou d’autres investisseurs. »
Cette mise en relation inédite est née ‘d’une initiative conjointe de la startup calédonienne NeoTech, de la Communauté du Pacifique et de la French Tech Nouvelle-Calédonie, avec le soutien du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, du Fonds Pacifique, de la DGOM, de VivaTech et de partenaires comme BNP NC et Groupama NC’, peut-on lire sur le dossier de presse envoyé par les représentants de ces entrepreneurs du Pacifique. « C’est impossible pour nous de venir sans ce soutien-là », précise Malik Oedin. « Rien que le coût du déplacement est compliqué… Grâce à cette initiative, nous sommes là groupés. Cela nous permet de porter plus facilement la voix du Pacifique. »
C’est donc un pari réussi pour les organisateurs de ce premier Village Pacific Tech qui ont pensé cette initiative ‘comme un véritable accélérateur de synergies régionales, autour de solutions durables, solidaires qui répondent aux grands défis sociaux, économiques et écologiques de la région’.
Abby Said Adinani