L’issue du vote ne faisait guère de doute. Le Sénat a largement adopté en première lecture le projet de loi pour « refonder Mayotte », ce mardi 27 mai 2025. Le texte a été adopté à 226 voix pour et 17 contre, rapporte l’AFP.
Eau, éducation, santé, infrastructures, sécurité, immigration, habitat informel… Ce texte décline près de quatre milliards d’euros d’engagements financiers de l’État pour l’archipel, dévasté par le cyclone Chido en décembre, avec certaines mesures dénoncées à gauche.
Le Ministre des Outre-mer Manuel Valls a salué l'adoption de ce projet de loi, indiquant que « ce texte donne corps à la troisième phase du plan « Mayotte debout » : celle de la transformation en profondeur du territoire. (…) Nous avons accompli un pas très important, décisif pour la reconstruction de Mayotte ».
Des mesures controversées sur l’immigration et la sécurité
C’est son volet migratoire et sécuritaire qui a suscité le plus de débats dans l’hémicycle de la Haute assemblée. La lutte contre l’immigration clandestine a en effet été érigée comme priorité par le gouvernement, face à l’afflux massif d’étrangers en situation irrégulière sur l’archipel, venus notamment des Comores voisines. Quitte à remettre fortement en cause le droit du sol, qui est la règle en France.
Le texte durcit les conditions d’accès au séjour, centralise les reconnaissances de paternité à Mamoudzou, la préfecture, et augmente les peines pour reconnaissance frauduleuse de paternité.
Il facilite aussi les expulsions de bidonvilles, en supprimant l’obligation d’annexer une offre de relogement à l’arrêté d’évacuation, en augmentant de 96 heures à sept jours le délai de flagrance pour constater la construction d’un habitat informel et en accroissant le nombre d’agents habilités pour ces contrôles.
Le titre III, à « dimension plus sécuritaire », prévoit des régimes juridiques spécifiques : renforcement des contrôles sur les armes, lutte accrue contre l’emploi d’étrangers sans titre et retrait possible des titres de séjour aux parents d’enfants considérés comme menaçant l’ordre public.
« On piétine les droits de l’Homme »
Cette dernière mesure, très encadrée, irrite fortement la gauche : elle permettra l’éloignement des familles, y compris lorsque la défaillance des parents compromet la « moralité » ou « l’éducation » de leur enfant.
« Aveuglé par la question migratoire et emporté dans une croisade contre l’immigration, le gouvernement s’attache à faire de Mayotte une terre où l’on piétine les droits de l’Homme », s’est indignée la sénatrice communiste de La Réunion, Évelyne Corbière Naminzo.
« La réalité, c’est que l’immigration vient hypothéquer toute perspective de développement de Mayotte », a rétorqué le co-rapporteur Horizons (droite), Olivier Bitz, pour qui « il n’y aura pas de refondation sans maîtrise des flux migratoires ».
Le projet contient aussi des dispositifs économiques et sociaux, avec la création d’une zone franche globale prévoyant notamment des abattements fiscaux à 100 %. Le texte facilite par ailleurs les expropriations en vue de reconstruire les infrastructures « essentielles » au territoire, comme des hôpitaux ou un nouvel aéroport.
Avec AFP