Lancé ce mercredi 12 novembre à Paris, le 33ème congrès de l’Association des communes et collectivités d’Outre-mer (ACCD’OM) réunit pendant trois jours près de 250 élus venus de l’ensemble des territoires ultramarins. Pour ce premier jour, les élus ont voulu faire entendre une voix commune. En ouverture, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, le président de l’Association des maires de France David Lisnard, la présidente de la Délégation sénatoriale aux Outre-mer Micheline Jacques ou encore la vice-présidente de l’ACCD’OM Sophie Charles, ont lancé un appel à passer des discours aux actes et à bâtir une République d’équité capable de répondre aux réalités ultramarines.
C’est à quelques pas de la Porte de Versailles, à la veille du 107ème Congrès des maires de France, que les élus ultramarins ont ouvert le 33ème congrès de l’ACCD’OM. Dans une salle comble, Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, a salué « la constance et la clairvoyance » de ces élus. « Les maires des outre-mer sont les vigies de la République, souvent confrontés avant les autres à ses fractures. Ce que vous exprimez ici, c’est une exigence de justice, pas une demande de faveur… L’égalité républicaine ne peut pas signifier uniformité. On ne peut pas traiter de manière identique des territoires qui ne partent pas de la même ligne. L’égalité, c’est l’équité. » Une position accueillie favorablement dans la salle, où beaucoup soulignent le décalage entre les intentions nationales et la réalité du terrain.
Sophie Charles, vice-présidente de l’ACCD’OM, a pris la parole dans la foulée. « Il est grand temps que nos Outre-mer intègrent le conscient collectif. Nous sommes encore trop souvent absents de cette conscience commune, alors même que nous faisons partie intégrante de la République. » Pour l’élue guyanaise, la question n’est plus de revendiquer, mais d’agir :« Nous enregistrons tous d’importants retards d’investissement, conséquence directe de notre histoire avec la nation. » La vice-présidente a également formulé deux propositions concrètes : renforcer la production et l’harmonisation des données publiques ultramarines, « condition indispensable à une meilleure adaptation des politiques publiques », et faciliter l’accès aux soins des étudiants originaires du Pacifique, confrontés à des difficultés administratives persistantes.
Des finances locales au cœur des débats
Tout au long de la matinée, la question des finances locales a occupé le centre des échanges. Hausse du coût de l’énergie, dépendance aux importations, stagnation des dotations : pour les élus ultramarins, la situation budgétaire devient critique. Devant l’assemblée, Sophie Charles a interpellé l’État sur l’inégalité des moyens : « Nous demandons une révision de nos outils budgétaires pour tenir compte de nos réalités. L’équité n’est pas un privilège, c’est une nécessité républicaine. »
Un message soutenu par David Lisnard, président de l’Association des maires de France, pour qui l’autonomie locale doit être vue comme un levier d’efficacité, non une menace : « Les maires ultramarins incarnent la République du quotidien, celle qui agit malgré tout. Mais on leur demande de faire plus avec moins. L’autonomie financière n’est pas une menace, c’est une condition d’efficacité. » Il a par ailleurs souligné que les Outre-mer sont souvent les précurseurs des défis nationaux et a plaidé pour une nouvelle vision des territoires ultramarins. Micheline Jacques, présidente de la Délégation sénatoriale aux Outre-mer, elle, a insisté sur la nécessité de ‘tropicaliser les normes’, autrement dit : d’adapter les règles nationales aux réalités locales. « Comment comprendre qu’en 2025, le bois de charpente arrive dans la Caraïbe depuis la Scandinavie alors que le pin de Guyane est naturellement résistant aux termites ? » Pour la sénatrice, il faut « changer de paradigme » dans la conception des politiques publiques, simplifier les procédures et redonner de la liberté d’action aux communes : « Le développement de vos territoires passe par la liberté d’agir. »
Un partenariat à reconstruire avec l’État
À mesure que les échanges se sont poursuivis, une même idée s’est imposée : celle d’un partenariat déséquilibré entre l’État et les communes ultramarines. Pour Sophie Charles, le constat est sans détour : « Nos collectivités assument des missions régaliennes sans en avoir les moyens. Cette situation n’est plus tenable. » Dans la salle, de nombreux élus ont appelé à un accompagnement renforcé pour les petites communes, souvent dépourvues de moyens techniques pour répondre, notamment, aux appels à projets nationaux ou européens. Le directeur général des Outre-mer, Olivier Jacob, a tenu à répondre directement : « Le couple maire-préfet reste la clé de voûte de l’action publique. L’État doit être un partenaire exigeant, mais surtout présent et constant. Notre devoir, c’est de donner aux élus les moyens d’agir, pas de les noyer sous la complexité. » Au-delà des discours, cette 33ème édition de l’ACCD’OM se veut un espace d’idées et de solutions. Les tables rondes et les ateliers prévus jusqu’à vendredi aborderont de nombreuses thématiques à l’instar de donnée publique au service du développement local, des dynamiques économiques ultramarines ou encore des enjeux climatiques.
Le congrès de l’ACCD’OM s’achèvera vendredi soir avec la remise du Prix de l’engagement Outre-mer 2025, organisé en partenariat avec Outremers360.























