Projet de loi Mayotte : Plus d’une trentaine de propositions au premier forum citoyen

©Facebook / Préfet de Mayotte

Projet de loi Mayotte : Plus d’une trentaine de propositions au premier forum citoyen

La concertation préparatoire au projet de loi Mayotte réunissait hier à Dembéni plus d’une centaine de participants. Un premier forum citoyen qui relève du succès selon les mots du préfet, où près de 150 personnes étaient présentes, pour un peu plus d’une trentaine de propositions formulées. Une première édition qui atteste de l’engouement des mahorais pour l’initiative ministérielle de concertation ? Reportage de notre partenaire France Mayotte Matin. 

« Je me félicite de voir le succès de ce premier forum citoyen, parce que très franchement nous nous posions des questions. Nous avons ouvert cette période de consultation et nous ne savions pas si les mahoraises et les mahorais allaient se saisir de cette occasion pour s’exprimer et ce matin, c’est une démonstration éclatante, les mahorais ont dit oui, les mahorais ont dit ’’nous prenons la parole’’ » déclarait hier Jean-François Colombet. 

Si le doute était permis quant au succès de cette première concertation citoyenne, particulièrement face au caractère quasi précipité de l’initiative mais aussi face à une confiance parfois limitée de la population mahoraise face au gouvernement et ses représentants, le succès semblait bel et bien au rendez-vous hier matin. Pas moins de 30 propositions ont ainsi pu être formulées, émanant de la population elle-même, et s’articulant autour des différents volets de cette loi programme. 

Ainsi, comme l’on pouvait s’y attendre, la question de l’immigration clandestine n’a pas manqué de susciter quelques interventions, comme le démontrait la prise de parole d’un enseignant présent. « Ma proposition pour stopper le flux migratoire et décourager les naissances à la chaîne à l’hôpital de Mamoudzou, c’est que les femmes en situation irrégulière qui viennent accoucher régulièrement au CHM de Mamoudzou, dès leur sortie de la maternité, que ces personnes soient reconduites immédiatement à la frontière ». 

Sur le thème de l’insécurité, Bacar Kassim, pompier professionnel à la caserne de Kawéni, proposait : « Cela fait des années qu’on subit des caillassages, des agressions, des vols de portable : ce sont des délits considérés comme des délits mineurs. Il y a trente ans, il y avait un caillassage tous les six mois. Maintenant ces délits-là sont trop récurrents. Je propose qu’ils passent en délits majeurs, parce que c’est trop souvent. Et ça s’invite même dans les lycées et dans les collèges. Donc s’il n’y a pas une répression forte par rapport à ces délits, ça ne va pas s’arrêter ». Et face à la thématique de la surpopulation en prison, le pompier proposait qu’« un jeune homme avec un titre de séjour, on ne l’envoie pas à Majicavo : on l’expulse tout simplement du territoire. Il perd son privilège d’avoir un titre de séjour ». 

Le député Mansour Kamardine ne s’est pas non plus privé d’émettre quelques propositions à l’assemblée. Parmi celles-ci, sans surprise et dans la lignée de ses déclarations précédentes, des considérations liées au volet social de la loi programme : « Les propositions sont connues, puisqu’il s’agit d’étendre à Mayotte le code du travail, le code de la sécurité sociale, le code de la santé, et qu’on évite les ordonnances qui ont vocation à nous sortir du dispositif. La deuxième proposition que j’ai faite, c’est de ramener le délai de rattrapage à compter du 1er janvier 2022, à 2026 au plus tard. Il faut qu’au 31 décembre 2026, tous les mahorais soient alignés au même niveau d’égalité sociale que les autres populations du territoire ». 

Quelques interventions parmi tant d’autres, toutes qualifiées de qualitatives par le préfet Jean-François Colombet : « Que retenons-nous ? D’abord, une très forte participation, ensuite une prise de parole parfaitement libre, avec des choses très intéressantes. Il y a énormément de gens qui ont parlé, mais on peut regrouper les discours dans 25 propositions, des propositions concrètes sur l’immigration, sur la sécurité, et aussi sur la convergence des droits sociaux. Je trouvais que le débat était de très haut-niveau, très intéressant, il n’y avait pas d’at- taques, pas de jugement, il y avait simplement des propositions pour l’avenir de ce territoire, et tout cela remontera chez le ministre. Nous ne trahirons aucune prise de parole ». 

Et à la question du changement concret que pourrait inspirer ces propositions, bien que certaines d’entre elles aient déjà été formulées de multiples fois, le représentant de l’État à Mayotte répond : « On est dans un exercice complètement inédit. C’est vrai que des missions sont déjà venues à Mayotte, qui ont déjà entendu les gens, les ont déjà consultés. C’est vrai qu’il y a des propositions qu’on a entendues ce matin, qui probablement avaient déjà été exprimées. Sauf que là ce qu’on demande, c’est d’exprimer des propositions dans le cadre d’un projet de loi. Il n’y a jamais eu de loi Mayotte ». 

Il reprend : « Les mahoraises et les mahorais qui s’expriment, ils s’expriment pour que leurs propositions soient éventuellement retenues dans le cadre du projet de loi. Et ce projet de loi, c’est une garantie pour le développement du territoire, c’est une garantie pour la sérénité dont ce territoire a besoin ». Un premier succès donc qui semble augurer de la volonté des mahorais de s’exprimer, de prendre part à ce processus démocratique et de s’imposer en acteurs du développement de leur territoire. Le prochain forum citoyen se tiendra à Sada le 14 mai prochain. Les populations du Centre-Ouest seront-elles aussi mobilisées ? 

Mathieu Janvier pour France Mayotte Matin