La France et l'île Maurice renforcent leur coopération sécuritaire, économique et universitaire dans l'océan Indien

Ravin Ramgolaam et Emmanuel Macron, jeudi à Port-Louis ©Emmanuel Macron

La France et l'île Maurice renforcent leur coopération sécuritaire, économique et universitaire dans l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre mauricien Navin Ramgolaam ont décidé jeudi de renforcer la coopération entre leurs deux pays, notamment en matière de sécurité, face aux « défis » auxquels ils font face dans l'océan Indien.

« Nous avons convenu d'unir davantage nos forces pour répondre ensemble aux enjeux les plus importants pour nos deux pays et pour la région », a déclaré Emmanuel Macron qui effectuait la première visite d'un président français à l'île Maurice depuis François Mitterrand en 1993.

La France est ancrée dans le sud-ouest de l'océan Indien à travers deux territoires, La Réunion -qui entretient des liens forts avec l’île Maurice- et Mayotte. Elle mobilise 1 600 militaires dans cette zone en proie à des trafics croissants (drogue, pêche illicite, immigration illégale…). Les présidents des Départements de ces deux îles françaises accompagnent par ailleurs le chef de l’État pendant son déplacement.

Les deux dirigeants ont acté une « meilleure mobilisation conjointe des moyens navals français, des capacités de surveillance aérienne mauricienne ainsi qu'un renforcement de notre offre commune de formation », a indiqué Emmanuel Macron, au premier jour d'une tournée africaine qui le conduira ensuite en Afrique du Sud pour le sommet du G20, au Gabon et en Angola.

Emmanuel Macron entend aussi réaffirmer la présence française dans le sud-ouest de l'océan Indien face aux ambitions croissantes de la Chine, la Russie et l'Inde.

Le Premier ministre mauricien, en poste depuis 2024, a relevé que les relations bilatérales avaient été « quelque peu négligées » ces dix dernières années mais souligné une volonté de les « redynamiser ». Les deux dirigeants ont eu des « discussions franches, empreintes de responsabilité et de bon sens » sur l'ilot Tromelin, détenu par la France au nord de La Réunion et sur lequel l'île Maurice revendique la souveraineté.

« Esprit d'ouverture »

Les deux pays ont aussi marqué leur volonté d'un retour à la stabilité à Madagascar après un coup d'État en octobre qui a conduit à l'exfiltration par la France du président Andry Rajoelina.  La France a « pris acte » de la « volonté » des nouvelles autorités malgaches d'organiser des élections dans un « délai raisonnable » et est prête à « accompagner la transition dans un esprit d'ouverture », a souligné Emmanuel Macron.

Le chef de l’État a rappelé que la France prendrait la présidence tournante de la Commission de l’océan Indien en 2026, « un moment de mobilisation régionale dans la continuité de la présidence mauricienne particulièrement réussie en 2023- 2024 ». 

Navin Ramgolaam a déclaré « souscrire entièrement aux efforts de la France, à la démarche de l'Union européenne et aux appels lancés par l'Union africaine et la SADC (Communauté de développement de l'Afrique australe) pour que la situation se stabilise le plus rapidement possible et surtout pour la jeunesse malgache et pour un retour à la démocratie ».

Côté bilatéral, l'Agence Française de Développement (AFD) a signé des accords pour sécuriser le réseau électrique mauricien face aux aléas climatiques de plus en plus violents que connaît l'île et moderniser le secteur de l'eau, pour lequel elle a déjà accordé un prêt de 200 millions d'euros en 2023. Ces nouveaux accords avec l’AFD seront « assortis d’une subvention européenne ». Le chef de l’État a aussi annoncé que « dès les prochains jours », EDF « analysera les vulnérabilités du réseau électrique » mauricien « pour proposer des solutions concrètes ». 

Dans son discours, Emmanuel Macron a aussi fait des annonces sur « la francophonie et l'éducation », avec notamment « la signature d'un accord de partenariat permettant l'introduction dans les établissements publics mauriciens d'une filière bilingue d'excellence, français-anglais ». « D'autres accords renforceront notre coopération universitaire, conforteront l'offre de formation française à Maurice et faciliteront la reconnaissance mutuelle de diplômes », a-t-il ajouté, confirmant aussi « la poursuite de l'organisation des BTS français par la Chambre de commerce et d'industrie de Maurice ».

L'île Maurice, qui compte un peu plus de 1,2 million d'habitants, est saluée comme une « success story » dans l'océan Indien. Jadis centrée sur la canne à sucre, elle s'est imposée comme un modèle de diversification économique vers le tourisme et les services financiers même si les fragilités s'accumulent ces dernières années.  

« C’est un pays qui est sorti en trente ans de la pauvreté pour être aujourd'hui aux portes des pays à revenus élevés », « une success story dans laquelle les entreprises françaises et les Français prennent toute leur part » relève la présidence française.

« Gagnant-gagnant »

Cette ancienne colonie française puis britannique, devenue indépendante en 1968, garde une solide tradition francophone, au côté de l'anglais. Plus de 10 000 ressortissants français y résident, selon l'Élysée.

Accueillis jeudi par le Premier ministre Navin Ramgolaam, Emmanuel Macron s’est ensuite entretenu en bilatérale avec son homologue Dharam Gokhool, président de la République mauricienne, après un échange de médailles entre les dirigeants des deux pays. Le chef de l’État a également rencontré la jeunesse de la région sur les sujets nouvelles technologies et intelligence artificielle. 

Il a ensuite rencontré les équipes du Plastic Odyssey, navire soutenu par la France et qui propose des solutions de recyclage du plastique. L’occasion de saluer l’engagement de l’Île Maurice lors de l’UNOC-3, et sa ratification du traité BBNJ sur la protection de la haute mer. 

« Nous avons aussi renforcé notre partenariat avec le développement de solutions d'économie circulaire, de solutions énergétiques, et là aussi, au-delà̀ de cette initiative, de la recherche à la production, notre volonté d’œuvrer pour la lutte contre le dérèglement climatique et la préservation de la biodiversité » a-t-il déclaré.

A chaque étape de sa tournée en Afrique, le président va « promouvoir des solutions économiques dans un partenariat gagnant-gagnant au service de nos entreprises, au service des Français, au service des pays africains », assure l'Élysée.

En Afrique du sud Emmanuel Macron, déterminé à accroître les liens avec les pays anglophones du continent, assistera au lancement d'un conseil d'affaires franco-sud-africain sur le modèle de celui qui existe déjà au Nigeria. Mais cette nouvelle politique africaine, gravée dans le marbre lors du discours présidentiel de Ouagadougou en 2017 et marquée par la volonté de se distancier de l'héritage de la France coloniale (la « Françafrique »), peine à se concrétiser. 

La part des échanges franco-africains a reculé dans le commerce africain global, sur fond de recul de l'influence française dans son ancien pré carré africain.

Avec AFP