EXPERTISE. « Des études scientifiques montrent l’efficacité des masques contre la transmission du SRAS-CoV-2 », par Mirdad Kazanji Directeur de l’Institut Pasteur de Guyane

EXPERTISE. « Des études scientifiques montrent l’efficacité des masques contre la transmission du SRAS-CoV-2 », par Mirdad Kazanji Directeur de l’Institut Pasteur de Guyane

Dans une expertise, le Directeur de l’Institut Pasteur de Guyane et membre du Conseil scientifique de la Collectivité Territoriale, Mirdad Kazanji, s’appuie sur plusieurs études scientifiques pour démontrer l’intérêt et l’efficacité du port des masques face à l’épidémie de Covid-19. 

Malgré un retour très agressif de l’épidémie de COVID-19 dans différentes régions du monde, certaines personnes doutent encore du rôle que les masques peuvent jouer contre la transmission et la propagation du SARS-Cov-2. Certains sont contre le portage des masques et d’autres les portent d’une façon inappropriée. Nous allons citer ici plusieurs études scientifiques qui ont été publiées récemment, montrant l’intérêt et l’efficacité du port des différents masques faciaux.

Une première étude publiée en mai 2020, réalisée à l’Université de Hong Kong par Chan et al. (1) utilise un modèle animal (hamster) susceptible à l’infection par SRAS-CoV-2.  Les chercheurs ont hébergé des animaux infectés ou sains dans des cages entourées de cloisons composées des mêmes tissus que ceux des masques chirurgicaux. Ils ont montré d’abord que 66% des animaux sains, mis à proximité d’animaux malades, peuvent être infectés par le SRAS-CoV-2 quand il n’y a aucune cloison autour de leurs cages. Mais en présence de cloisons, seulement 25% des animaux ont attrapé le SRAS-CoV-2. En plus, ces animaux infectés ont montré plus de signes modérés de la maladie et une charge virale plus faible que leurs voisins des cages sans cloison. Ces premiers résultats obtenus in vivo avec des modèles animaux, montrent que l’utilisation du masque protège contre l’infection, réduit l’impact de la pathologie et réduit la charge virale transmise d’une façon très importante.

Une autre étude publiée récemment (octobre 2020) réalisée à l’Université du Wisconsin-Madison par l’équipe le Dr Kawaoka et ses collaborateurs (2), a évalué l’efficacité protectrice de différents types de masque contre la transmission aéroportée de gouttelettes ainsi que des aérosols infectieux. Dans cette étude, les chercheurs ont créé un simulateur de transmission aéroportée de gouttelettes et d’aérosols infectieux contenant du SRAS-CoV-2, identiques à celles produites par la respiration et la toux des personnes infectées. Cette étude a été réalisée en prenant en compte deux paramètres, la distance de 50 cm entre le diffuseur et le récepteur et une durée de 20 min d’exposition. Ils ont montré que les masques chirurgicaux, les masques en coton ainsi que les masques FFP2 ont tous un effet protecteur contre la transmission du SRAS-CoV-2. Ils ont aussi montré que l’efficacité protectrice de ces masques est plus élevée lorsqu’ils sont portés par la personne infectée et diffuseuse de virus. Néanmoins, les différents types de masques n’ont pas tous la même efficacité. Ainsi, ils ont montré que :

– les masques en coton sont capables de réduire d’environ 20% à 40% l’absorption du virus par un receveur par rapport à l’absence de masque.

– Le masque FFP2 a la meilleure efficacité protectrice avec une réduction d’environ 80% à 90% de l’absorption du virus par rapport aux autres masques testés.

– Lorsqu’un masque en coton ou chirurgical est porté uniquement par le diffuseur de virus, ce masque bloque plus de 50% de la transmission. Il y a aussi un effet synergique lorsque le diffuseur et le récepteur de virus portent des masques en coton ou chirurgicaux.

Dimanche 12 juillet 2020. Cayenne, Guyane. Visite officielle de Jean CASTEX, Premier ministre, Sébastien LECORNU ministre des Outre-Mer et Olivier VÉRAN ministre des Solidarités et de la Santé. Présentation par Mirdad Kazanji, directeur de l'Institut Pasteur de Guyane, du laboratoire vectopole ©Jody Amiet

Dimanche 12 juillet 2020. Cayenne, Guyane. Visite officielle de Jean Castex, Premier ministre, Sébastien Lecornu ministre des Outre-mer et Olivier Véran ministre des Solidarités et de la Santé. Présentation par Mirdad Kazanji, directeur de l’Institut Pasteur de Guyane, du laboratoire vectopole ©Jody Amiet

De plus, ils ont montré que porter des masques chirurgicaux et les FFP2 à une distance de 50 cm et pendant 20 min d’exposition entre le diffuseur et le receveur ne bloque pas totalement la transmission virale même lorsqu’ils sont complètement scellés au visage. Ils ont enfin évalué l’effet de la charge virale sur la transmission et ont montré qu’il n’y avait pas de différence d’efficacité protectrice ou une corrélation significative entre la charge virale et la transmission en utilisant tous les masques testés incluant les masques FFP2.

Des charges virales élevées ont été détectées dans des prélèvements nasopharyngés ou dans la gorge de patients asymptomatiques, présymptomatiques, et évidemment chez les patients symptomatiques favorisant la transmission. C’est pourquoi il est fortement recommandé à l’ensemble de la population de porter des masques et de réduire au maximum le risque de contamination, en maintenant une distance minimum d’un mètre et en limitant les échanges entre les personnes à un laps de temps court.

Selon un article publié en octobre 2020 (3), on constate aussi que les pays où les populations sont habituées à porter des masques depuis la pandémie du SRAS en 2003 en Asie (comme par exemple le Japon, Hong Kong, Taiwan, la Thaïlande, la Corée du Sud et Singapour), ainsi que ceux qui ont récemment adopté le portage des masques au début de la pandémie de COVID-19, (exemple la République Tchèque), il y a un nombre plus faible de malades gravement atteints ainsi qu’un taux de mortalité moins important que dans d’autres pays où le portage de masque n’est pas habituel.

Comment éliminer les masques usés ?

Les masques chirurgicaux sont fabriqués à partir de polypropylène, une matière thermoplastique non biodégradable, et sont aujourd’hui peu recyclés. Dans les laboratoires de recherche ainsi que dans le milieu hospitalier, ils sont considérés comme des DASRI. Leur élimination nécessite un protocole particulier réalisé par des sociétés spécialisées. Malheureusement depuis le début de l’épidémie de COVID-19, les masques à disposition du grand public n’ont pas été intégrés dans la même filière d’élimination des déchets de type DASRI.

Il faut noter qu’un masque porté par un malade peut contenir des millions de particules virales infectieuses. Le Haut Conseil de Santé Publique ainsi que le Ministère de la Santé préconisent de réserver un sac plastique spécifiquement dédié aux déchets présentant un risque infectieux (masques, mouchoirs), de jeter ensuite ces déchets uniquement dans ce sac, de ne pas faire de mélange avec les autres ordures ménagères. Il est recommandé par la suite de fermer le sac, le placer dans un deuxième sac plastique pour ordures ménagères et de stocker ce double sac de déchets contaminés à votre domicile durant 24 heures. Le respect de ce délai permet de réduire fortement la viabilité du virus sur des matières poreuses. Après ce délai de 24h, vous pouvez éliminer le double sac avec les ordures ménagères (4).

Mirdad Kazanji

Directeur de l’Institut Pasteur de Guyane et membre du Conseil scientifique de la Collectivité Territoriale (CTG).

Références :

1 – Chan JF, et al. Surgical mask partition reduces the risk of non-contact transmission in a golden Syrian hamster model for Coronavirus Disease 2019 (COVID-19). Clin Infect Dis. 2020 May 30:ciaa644.

2 – Ueki H, Furusawa Y, Iwatsuki-Horimoto K, Imai M, Kabata H, Nishimura H, Kawaoka Y. Effectiveness of Face Masks in Preventing Airborne Transmission of SARS-CoV-2. mSphere. 2020 Oct 21;5(5):e00637-20.

3 – Gandhi M, Beyrer C, Goosby E. Masks Do More Than Protect Others During COVID-19: Reducing the Inoculum of SARS-CoV-2 to Protect the Wearer. J Gen Intern Med. 2020 Oct;35(10):3063-3066.

4 – https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/fiche_covid19_ dechets_contamines_ elimination_particulier_ 20200323_vf.pdf