Bateaux, jetski, nageurs et même avions… l’activité humaine perturbe la vie sous-marine de nos lagons. Pour mesurer notre impact, des bouées connectées vont être mises en place à Bora Bora. Le projet était présenté cette semaine dans le cadre de la journée mondiale de l’eau. Un sujet de notre partenaire TNTV.
Le lagon de Bora Bora sera bientôt le tout premier lagon connecté au monde. Des bouées vont être installées pour écouter le monde sous-marin et y mesurer l’impact de l’activité humaine. Le projet mené par la Polynésienne des eaux, Suez, le Criobe et l’université de Lièges, est baptisé Bor’acoustic. « Il faut savoir que les poissons communiquent, explique David Lecchini, chercheur au Criobe (…) Les poissons échangent comme nous on est en train d’échanger. Et un des problèmes, c’est que dans le milieu marin les poissons vont échanger, mais s’il y a un bateau qui passe, un avion qui passe, il y a une pollution sonore qui va être engendrée. Nous, s’il y a une voiture qui passe, on va pouvoir augmenter notre voix, notre intensité. Les poissons eux ne le peuvent pas. Et donc cette pression qu’il peut y avoir par le bruit des bateaux, les activités humaines, va avoir un impact très fort sur la communication entre les poissons. »
Les poissons, stressés par le bruit
Le bruit provoque un stress chez les poissons qui vont se cacher, et moins se nourrir. Les bouées connectées, équipées d’enregistreurs acoustiques vont enregistrer divers paramètres : température, courant, poissons… « Les bouées vont être des signaux d’alertes. En enregistrant les poissons, comment ils communiquent, on peut savoir s’ils sont stressés. (…) Bor’acoustic va être un enregistreur, un capteur en permanence dans le milieu naturel. » Ces bouées seront installées dans le lagon, aux quatre points cardinaux de l’île de Bora Bora.
Sonde acoustique et intelligence artificielle
Les données recueillies seront traitées par des intelligences artificielles et rendues disponibles à la population, aux investisseurs, touristes, mais aussi aux écoles. Objectif : sensibiliser. « L’innovation dans ces bouées c’est qu’elles vont pouvoir préanalyser la donnée, et la renvoyer vers des sites grand public qui permettront à chacun d’avoir un accès à l’information », explique Mathieu Desetres, directeur de la Polynésienne des eaux et également de la société Bor’acoustic.
Les données pourront être diffusées sur des écrans dans les établissements scolaires, sous forme d’une « météo » sous-marine. « Tous les jours ou toutes les heures, ils pourront voir la pression sonore qu’il y a dans le lagon de Bora Bora ou comment les poissons communiquent entre eux. On va sortir des indices, voire aussi des couleurs, imagine David Lecchini. Du vert jusqu’au rouge par exemple. Vert : l’écosystème est en bonne santé. Rouge : il y a un problème qui peut être une pollution sonore, qui peut être lié à un changement global… »
Pour la Polynésienne des eaux qui gère l’assainissement de la commune de Bora Bora, les bouées connectées sont aussi un moyen de surveiller la qualité de l’eau : « Tout problème d’assainissement peut avoir un impact sur le lagon donc mettre en place des bouées connectées à quatre endroits sur la lagon, va nous permettre de suivre la qualité du lagon et de voir s’il y a un impact d’une manière générale de notre activité sur le lagon ».
Présenté au Tech4 Islands Summit l’année dernière et lors de la journée mondiale de l’eau cette semaine, le projet Bor’acoustic est en phase de recherche d’investisseurs. La société travaille avec la plateforme locale Invest’in Pacific et rencontre en ce moment des financeurs.
La mise en place des bouées pourrait enfin permettre à la commune de suivre les effets du rahui et de prendre d’autres mesures pour protéger le lagon et sa faune : réduire la pollution sonore par l’utilisation de bateaux à moteurs électriques par exemple.
Les premières bouées pourraient être installées cette année.
Par Manon Kemounbaye pour TNTV