Nouvelle-Calédonie : Les juges ordonnent la remise en liberté de Christian Tein, le parquet s’y oppose

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Nouvelle-Calédonie : Les juges ordonnent la remise en liberté de Christian Tein, le parquet s’y oppose

Le leader indépendantiste Christian Tein a été remis en liberté sous contrôle judiciaire mardi par les juges d'instruction chargés de l'enquête sur les émeutes mortelles de 2024 en Nouvelle-Calédonie, mais il n'est pas encore à libre : le parquet de Paris s'y est opposé et la cour d'appel devra trancher.

Le référé-détention opposé par le ministère public fait que Christian Tein, en détention provisoire au centre pénitentiaire de Mulhouse-Lutterbach (Haut-Rhin) depuis juin 2024, va rester dans l'immédiat en prison.

Selon une autre source proche du dossier, au moins trois autres indépendantistes détenus dans l'Hexagone, Dimitri Qenegei, Guillaume Vama et Erwan Waetheane, ont bénéficié du même élargissement par les juges d'instruction et ont fait l'objet de la même opposition par le parquet. Christian Tein, élu en août président du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), a toujours nié avoir appelé à commettre des violences et se présente comme un « prisonnier politique ».

Selon la première source proche à l'AFP, les trois juges d'instruction qui ont interrogé cet homme de 57 ans le 27 mai ont accepté mardi sa remise en liberté sous contrôle judiciaire, avec interdiction de se rendre en Nouvelle-Calédonie et d'entrer en contact avec 13 autres protagonistes du dossier.

Les magistrats ont notamment estimé qu'à ce stade de la procédure, il n'est pas démontré que Christian Tein ou d'autres mis en examen auraient préparé un attroupement armé ou un groupement violent, selon la source proche du dossier. Ils notent d'ailleurs que l'érection de barrages était, de l'avis de nombreux mis en cause, « fréquent » sur le Caillou et imputable tant aux militants indépendantistes qu'aux « voisins vigilants » qui se sont réunis dans certains quartiers.

Selon cette source, l'étude des supports informatiques de Christian Tein n'a pas révélé à ce stade d'élément incriminant. De même source, les juges d'instruction ont aussi relevé l'éloignement géographique important subi par Christian Tein avec la Nouvelle-Calédonie, distante de l'Hexagone de plus de 16 500 kilomètres.

« Nouvelle lecture »

Le parquet s'est opposé à cette libération, estimant que Christian Tein a occupé une place centrale comme commanditaire d'un plan d'actions violentes contre l'État en trois phases visant à déstabiliser les entreprises et commerces, les administrations et services de l'État par la commission de nombreuses exactions contre les biens et les personnes.

Pour le ministère public, Christin Tein pourrait vouloir se soustraire à la justice grâce à des complices, s'il parvenait à rejoindre l'archipel grâce à sa remise en liberté, toujours de source proche.Un juge de la cour d'appel de Paris doit dire dans les 48 heures s'il suspend les effets de l'ordonnance de mise en liberté.

Si c'est bien le cas, Christian Tein resterait en détention jusqu'à l'audience à la chambre de l'instruction, prévue dans les dix jours, qui devra confirmer ou infirmer la remise en liberté. Dans un communiqué, les trois avocats de Christian Tein, Mes François Roux, Pierre Ortet et Florian Medico, se sont « félicités de la nouvelle lecture du dossier » par les juges et estimé que l'opposition du parquet de Paris était « en totale déconnexion avec les évidences de la procédure ».

Christian Tein est le chef de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), une organisation que la justice soupçonne d'être derrière les émeutes qui ont éclaté le 13 mai 2024 en Nouvelle-Calédonie, faisant 14 morts, dont deux gendarmes, et plus de deux milliards d'euros de dégâts.

Comme d'autres militants de la CCAT, Christian Tein a été mis en examen dans la foulée, dans une enquête d'abord instruite à Nouméa, portant sur des soupçons de complicité de tentatives de meurtres, association de malfaiteurs, participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens, vols avec arme et destructions, en bande organisée.

En janvier 2025, l'information judiciaire a été dépaysée à Paris. Selon la source proche du dossier, Christian Tein n'est plus que témoin assisté pour l'infraction la plus grave qui lui était reprochée, la complicité par instigation d'homicides ou de tentatives d'homicides à l'encontre de personne dépositaires de l'autorité publique, mais aussi pour celle de provocation directe à un attroupement armée.

La militante indépendantiste kanak Frédérique Muliava a été autorisée vendredi à quitter l'Hexagone et à rentrer à Nouméa.

Avec AFP