Parue aux éditions Hervé Chopin dès 2003, enrichie en 2007, puis en 2016 sous la baguette éclairée et poétique de l’auteur martiniquais André Lucrèce, une nouvelle édition de « Martinique d’Antan» est disponible. Porté par la force esthétique et historique de la carte postale et à travers récits et témoignages, cet ouvrage nous propose un regard sur le passé qui permet de mesurer l’évolution de l’île.
Non, il ne s’agit pas d’un culte de la nostalgie du genre « c’était mieux avant », mais plutôt le passé qui éclaire la vie. C’est en tout cas dans cet esprit que s’inscrit le sociologue et écrivain martiniquais André Lucrèce lorsqu’il nous emmène à la découverte de la Martinique à travers ses 400 cartes postales datant du début du 20è siècle et les récits et témoignages qu’il a recueillis pour nous faire revivre cette « Martinique d’Antan ».
Un regard sur le passé pour comprendre le présent commencé en 2003, enrichi en 2007, puis en 2016 dans des ouvrages parus aux éditions Hervé Chopin, une maison d’édition présente depuis 20 ans aux Antilles et devenue le premier éditeur de beaux livres aux Antilles. Via sa collection Images d’Antan, HC éditions entend valoriser la culture, l’histoire et le patrimoine des Antilles avec des ouvrages portés par la force esthétique et historique de la carte postale.
Un voyage à travers des mondes innombrables
La mouture 2020 de « Martinique d’Antan » est dans le droit fil des ouvrages précédents tels « Scènes des Antilles Antan lontan » ou « La Guadeloupe » de l’écrivaine guadeloupéenne Gisèle Pineau, deux opus parus dans la même collection. Comme eux précédemment, « Martinique d’Antan » se propose d’ouvrir les cahiers d’une mémoire où cheminent les lieux et l’esprit d’antan. C’est aussi l’occasion pour André Lucrèce de poursuivre sa réflexion sur les paysages, les mythes et les croyances des sociétés antillaises et leur influence sur la modernité de ces sociétés.
De sa plume alerte où se mêlent lyrisme et poésie, l’auteur martiniquais nous invite à découvrir la Martinique dans tous ses états, sa diversité et ses composantes. Dans un road-movie local, il nous emmène au fil de ses divagations et ses routes paradoxales à bord de taxipays de Fort-de-France, l’exhubérante et l’effervescente à Saint-Pierre d’avant la catastrophe de 1902, considérée alors comme le « Petit Paris des Antilles », jusqu’à Rivière-Pilote et son esprit frondeur, en passant par Saint-Joseph, « la ville du ruissellement, des sirènes et des Anthuriums, dont les rues plient et déplient sous l’oeil impérial de son église ».
Un voyage à travers des mondes innombrables où chaque lieu est une « exhortation ». Des mondes, comme le souligne l’auteur dans son langage poétique, « abreuvés de lumières et de formes qui ont jailli de la diversité des paysages, abreuvés de toute cette végétation, de tous ces jardins, de tous ces totems rencontrés sur les routes…. »
Une offrande visuelle
Des grandes cités, des cases, des gestes et des gens. Bref, des rencontres avec celles et ceux qui ont fait la Martinique (marchandes, pêcheurs, coupeurs de canne, quimboiseurs…). « Tu entrevois l’habitation, dominant les rues-cases que l’on tient à distance, tu devines la prédation et tu revois la liberté secrète dans sa chrysalide qui annonce les embrasements et la métamorphose »…. s’enflamme encore André Lucrèce dans sa tentative de nous faire revivre cette histoire certes douloureuse mais sur laquelle se sont construits néanmoins les Martiniquais.
Grâce à cette offrande visuelle par laquelle « se livre le temps courbé du passé », voici restitué, pour paraphraser l’auteur, « l’apparaître des choses dans le langage des lieux et l’esprit d’antan, entre les bords d’une liberté qui s’en remet aux traces ».
En cette période troublée et quelque peu nostalgique du monde d’avant, cet ouvrage qui permet de mesurer l’évolution de la Martinique, pourrait être une bonne idée de cadeau dans la perspective des fêtes de Noêl et de fin d’année.
E.B.
Martinique d’Antan – édition 2020
de André Lucrèce
128 pages
400 cartes postales anciennes
HC éditions
