Commémorations du 10 mai : La cérémonie nationale présidée par le Premier ministre Gabriel Attal, célébrée pour la première fois à La Rochelle

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Commémorations du 10 mai : La cérémonie nationale présidée par le Premier ministre Gabriel Attal, célébrée pour la première fois à La Rochelle

La 19ème cérémonie nationale à l’occasion du 10 mai, Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions se déroulera cette année pour la première fois hors de Paris, à la Rochelle, sous la présidence du Premier ministre Gabriel Attal.

Après 18 éditions dans la capitale parisienne, la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions sera commémorée dans la ville de La Rochelle, sous la présidence du Premier ministre Gabriel Attal. « Par ce déplacement dans une ville qui a été le premier port français à se lancer dans la traite esclavagiste entre l’Afrique et les Amériques, en 1594, il y a 430 ans cette année, le Premier ministre entend montrer l’importance qu’il attache à cette page de notre histoire, qui est aussi celle des combats contre l’esclavage », explique la Fondation pour la mémoire de l'esclavage. 

Alors que la ville de La Rochelle est de longue date engagée dans la reconnaissance et la transmission de ce passé, le déplacement hors de Paris de la cérémonie nationale du 10 mai 2024 marque la volonté du Premier ministre de saluer le travail exceptionnel des élus locaux et des acteurs des territoires pour transmettre la mémoire, comme il l’a déjà fait à Arras à l’occasion de la cérémonie de la Journée nationale d'hommage aux victimes de terrorisme.

Ce déplacement s’inscrit dans la thématique annuelle du Temps des Mémoires 2024, « Les résistances à l’esclavage », que le Premier ministre a fixée dans sa circulaire interministérielle du 19 mars 2024. La cérémonie rochelaise lui permettra en effet : de saluer la résistance des esclaves y compris sur le sol de la France hexagonale, à travers la figure de Clarisse, une femme qui a vécu en servitude à La Rochelle sous la Révolution et qui y a demandé son émancipation, avant le vote de la première abolition en 1794 »  mais aussi de «  marquer la solidarité de la France avec le peuple d’Haïti, nation née du combat contre l’esclavage en 1804 et qui connaît actuellement une situation dramatique», à travers la présence du sculpteur haïtien Filipo, qui est le créateur de la statue de Clarisse, et qui vit habituellement à Port-au-Prince.

Pour marquer ce temps fort, la cérémonie débutera par un cheminement musical avec le groupe Dissoo, puis la lecture d’un texte d’Aimé Césaire par des élèves du lycée AMEP (Association Martiniquaise d'Education Populaire) de Fort-de-France et la restitution du travail de l’année des élèves du collège Fromentin de La Rochelle sur le combat du Réunionnais Furcy, qui s’est battu pendant 25 ans avant 1848 pour être reconnu libre par les tribunaux français.

Sera suivie une prise de parole de Jean-Marc Ayrault, Président de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage, le Premier ministre Gabriel Attal prononcera un discours. La cérémonie nationale s’achèvera par un dépôt de gerbe à la statue de Clarisse qui sera inaugurée ce jour et la Marseillaise chantée par la chanteuse Nadine Tshilombo. A noter qu'une cérémonie aura également lieu dans les Jardins du Luxembourg à Paris. Elle sera présidée par le Président du Sénat Gérard Larcher, en présence de la ministre déléguée en charge des Outre-mer Marie Guévenoux.
 

Zoom sur la statue Clarisse et son auteur

Clarisse était une femme née en esclavage dans la colonie française Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti), qui a vécu à La Rochelle après y avoir été amenée par ses maîtres en tant que nourrice. Au 18ème siècle en France, selon une dérogation obtenue par les colons, des esclaves pouvaient subsister sur le sol de France sans y être émancipés, comme le droit de l’Ancien Régime l’imposait depuis 1315. Ils furent quelques milliers jusqu’en 1794 à vivre dans ce statut en France métropolitaine, principalement dans les ports et les grandes villes. Clarisse est connue car les historiens ont retrouvé la trace de sa demande formulée en 1793 au « Conseil Général de la commune » pour obtenir sa liberté qu'elle a obtenu. Sa présence à La Rochelle rappelle que l’esclavage français ne concernait pas que les colonies ; sa requête au conseil général montre qu’elle avait conscience de ses droits.

La pratique des nourrices était très répandue en France dans les classes dominantes sous l'Ancien Régime. La femme esclave était choisie pour nourrir l’enfant de ses propriétaires. Elle devait elle-même avoir un enfant pour allaiter. A Saint-Domingue, les mères nourrices restaient un mois au repos sans travailler avec leur enfant nouveau-né avec un régime alimentaire préférentiel (on doit leur donner "la soupe de ma table" dit textuellement le négociant esclavagiste rochelais Aimé-Benjamin Fleuriau). A partir de 1786, elles reçoivent une récompense (12 gourdes – nom de la monnaie locale). Au 7e enfant, elles sont déclarées libres. A La Rochelle, au Musée du Nouveau Monde, un tableau représente une nourrice affranchie et l’enfant de colon, Marie-Anne Grellier, peint par Chanteloup en 1718.

Woodly Caymitte, dit Filipo, est un artiste haïtien résidant à Port-au-Prince. Il est sculpteur et a déjà représenté d’autres figures de l’histoire française et haïtienne de l’esclavage, notamment la statue de Modeste Testas inauguré en 2019 à Bordeaux.
La sculpture de Clarisse, commande de la Ville de La Rochelle sera inaugurée le 10 mai 2024 dans le parc d'Orbigny, en présence de l’artiste, du Maire de La Rochelle Jean-François Fountaine, du Préfet, de l’ambassadeur d’Haïti en France, de nombreuses personnalités, associations, scolaires et public. Elle rend hommage à la dignité et à la résilience des victimes de la traite et de l’esclavage, particulièrement en Haïti, plus grande colonie française esclavagiste à la fin du 18ème siècle, qui fut le théâtre de la plus grande révolte d’esclaves de l’histoire.