Gestion des déchets : À Mayotte, « la réglementation a beaucoup changé », explique Hervé Madiec

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Gestion des déchets : À Mayotte, « la réglementation a beaucoup changé », explique Hervé Madiec

Présent à Mayotte sous les dénominations Star Mayotte et Star « Urahafu », le groupe Suez y est le principal acteur du recyclage et de la valorisation des déchets. Hervé Madiec, directeur général océan Indien Suez recyclage et valorisation, a accepté de faire le point sur l’activité à Mayotte et les enjeux de la filière avec notre partenaire Mayotte Hebdo. Celui-ci s’intéresse également à la construction de futures usines de dessalement.

Dans quels domaines le groupe Suez intervient à Mayotte ?

Il s’agit essentiellement du traitement des déchets. Alors que la collecte est assurée par les collectivités (Cadéma et Sidevam), le seul site d’enfouissement de l’île qui les accueillent, à Dzoumogné, est géré par Star Mayotte. La société s’occupe également du traitement de déchets industriels, de leur recyclage via Citeo (un éco-organisme dédié aux entreprises), voire de produits dangereux (chimiques, pétroliers). « On se spécialise. La réglementation a beaucoup changé ces dernières années. Elle oblige les entreprises à faire beaucoup plus de tri », fait remarquer Hervé Madiec, en visite à Mayotte, la semaine dernière. Le directeur général océan Indien Suez recyclage et valorisation compte 400 salariés dans l’océan Indien, dont 90 en CDI à Mayotte. « Il y a également de la prévention. On accueille régulièrement des écoles », renchérit Sébastien Suchy, le directeur de Star Mayotte et Star « Urahafu » (propreté en shimaoré).

Où en est le site d’enfouissement de Dzoumogné ?

« Il y a de la place », assure le directeur local. Il évalue à « dix, treize ans » les capacités de stockage du site.

Quelle est la part des déchets recyclés à Mayotte ?

Elle est actuellement très réduite puisque seul 1% des déchets rentre dans le circuit du recyclage. Cela représente 512 tonnes par an. La plupart est envoyé en métropole, mais également en Chine, en Corée ou en Australie. Cependant, les lois incitent de plus en plus à s’améliorer sur ce point. « On accompagnera le territoire mahorais dans cette transformation », promet le directeur régional.  « Pour Citeo, on nous demande de trier quatre ou cinq plastiques différents pour améliorer leur valorisation », fait-il déjà remarquer. Et la loi va s’avérer de plus en plus contraignante. Les deux hommes évoquent notamment 2026 et la fin des emballages plastiques. Concernant les déchets alimentaires, la métropole va devoir se conformer à l’obligation d’avoir un bac à compost dès 2024, ce qui ne sera pas encore le cas en outre-mer. « Mais un jour, ça viendra », prévient le directeur basé à La Réunion. 

Combien il y a de bornes d’apports volontaires sur l’île ?

Il y en a presque 700 dorénavant. 160 ont été ajoutées sur la période 2021-2022. Et ça marche, les camions passent six jours sur sept pour les vider. « Ce n’est pas pareil partout. Elles sont moins utilisées dans le nord de Mayotte que dans le sud et à Mamoudzou », admet Sébastien Suchy. Preuve que le tri est plutôt bien fait localement, les deux directeurs ont constaté que le taux de refus y est deux fois moins élevé qu’à La Réunion par exemple. Parmi les déchets qui pourraient faire l’objet d’un effort, il reste ceux du bâtiment. « On en voit beaucoup le long des routes », observe Hervé Madiec.

Comment le groupe compte encore valoriser les déchets ?

A Dzoumogné, la récupération du gaz est déjà en marche. Les tuyaux disséminés dans la matière en décomposition permettent d’accumuler assez l’énergie afin d’alimenter une population de « 5.000 habitants », note Sébastien Suchy. Ce chiffre pourrait passer prochainement à 10.000. La biomasse est l’une des pistes sur laquelle Suez veut aller plus loin, même si l’humidité du milieu tropical rend les choses plus complexes.

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Autre élément important, à Sainte-Suzanne (La Réunion), Suez vient de se doter d’une usine toute neuve qui doit « valoriser les déchets à hauteur de plus 70% ». En effet, près de 30% des déchets seront transformés en matières premières recyclées (carton, plastique, métaux ferreux et non ferreux) et en compost. 48% seront réduits à l’état de combustible pour alimenter une unité de production électrique. Cette première du genre intéresse déjà les autres départements ultramarins, dont Mayotte.

Des usines de dessalement construites par Suez ?

Le syndicat des eaux de Mayotte souhaite, pour répondre au manque d’eau potable, construire de nouvelles usines de dessalement sur Grande-Terre. Les sites de Sada, Longoni et Ironi Bé sont privilégiés. Échaudé par les problèmes de production sur Petite-Terre de la Société mahoraise des eaux (SMAE), le syndicat local pourrait être intéressé par d’autres alternatives. En tout cas, Suez serait au rendez-vous. « On a un catalogue qui a déjà fait ses preuves », vante Hervé Madiec, tout en assurant que seule la maîtrise d’ouvrage intéresse Suez « pour l’instant ». 

Alexis Duclos pour Mayotte Hebdo