Gestion des déchets en Outre-mer : les premières auditions ont commencé au Sénat

Déchets abandonnés au bord d’une route à Mayotte ©DR

Gestion des déchets en Outre-mer : les premières auditions ont commencé au Sénat

La Délégation sénatoriale aux Outre-mer, présidée par Stéphane Artano (Rassemblement démocratique et social européen – Saint-Pierre et Miquelon), a débuté ses travaux sur la gestion des déchets dans les territoires ultramarins jeudi 19 mai en auditionnant des représentants de la Direction générale des Outre-mer (DGOM), de la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) et de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).

 

Ce premier cycle d’auditions va se poursuivre jusqu’à l’été. « Outre des tables rondes géographiques en visioconférence, deux déplacements sont prévus, le premier à La Réunion et à Mayotte fin juin, le second à Saint-Pierre et Miquelon mi-septembre », a annoncé la Délégation dans un communiqué. Les conclusions du rapport d’information à venir (dont les sénatrices de l’Aude Gisèle Jourda du groupe Socialiste, écologiste et républicain, et de La Réunion Viviane Malet du groupe Les Républicains ont été désignées co-rapporteures) seront présentées en novembre prochain.

« Comme l’a souligné son président Stéphane Artano, la collecte et le traitement des déchets sont, au même titre que l’accès à l’eau ou l’assainissement, un service public de base indissociable de la qualité de vie et de la santé publique. La délégation procédera à l’évaluation d’une politique publique confrontée à de profondes transformations pour être au rendez-vous des objectifs du ‘zéro déchet’ et de l’économie circulaire », poursuit le texte. « Placées au premier rang des priorités du nouveau quinquennat, les problématiques environnementales revêtent en Outre-mer une acuité particulière. Décharges sauvages, pollution des littoraux, tri sélectif insuffisant y témoignent d’une situation préoccupante. » 

Durant l’audition, la sénatrice de La Réunion Viviane Malet, l’une des co-rapporteures, a dit constater chaque jour les défis des déchets sur son île. « Les volumes ne cessent de croître malgré les efforts déployés et les contraintes propres à nos territoires sont autant de complications. Sur les déchets nous sommes en alerte rouge », a-t-elle insisté. « De fortes stratégies doivent être encore déployées ».

Retrouvez l’intégralité de l’audition ci-dessous

« Les territoires ultramarins font face à de nombreux défis », a reconnu Vincent Coissard, sous-directeur des déchets et de l’économie circulaire à la DGOM. « On voit aussi qu’on a des différences assez importantes d’un territoire à l’autre. (…) La production de déchets en Guyane est beaucoup plus faible par habitant par rapport au niveau national, alors qu’elle est supérieure à La Réunion. Une grosse différence que l’on peut aussi constater et qui est globale sur l’ensemble des territoires, c’est un assez fort recours à la mise en décharge, que l’on n’a pas forcément au niveau national. » 

Pour sa part, Nicolas Soudon, directeur exécutif des territoires à l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) a fait remarquer que « la gestion des déchets en Outre-mer est un enjeu particulier et un défi majeur à relever du fait de la situation d’insularité et d’isolement de la majorité des territoires. Cela produit une masse critique souvent trop limitée pour rentabiliser des investissements importants en matière de gestion des déchets et notamment en matière de recyclage ». Par ailleurs, quand on essaie de procéder soit à des mutualisations soit à de la gestion internationale des déchets on se trouve confronté à un coût rédhibitoire du transport, qui s’est encore accentué ces derniers temps avec la hausse des prix du pétrole. « Il s’ajoute à cela la décision récente de la compagnie CMA-CGM de ne plus transporter de déchets plastiques à partir du 1er juin 2022. Cela entraîne un risque important pour presque tous les territoires d’Outre-mer, la compagnie étant un acteur dominant sur le marché », a-t-il précisé.

Le problème des déchets dans les Outre-mer a évidemment des impacts sur la biodiversité mais aussi sur le foncier, qui est rare dans la plupart des territoires. Cela oblige à trouver des solutions alternatives à l’enfouissement, qui est très demandeur d’espace. Autre élément de vulnérabilité, les déchets du BTP qui sont parmi les plus importants et qui nécessitent des mesures et des investissements lourds pour les gérer, d’autant que les solutions de transports maritimes des déchets du BTP ne sont pas envisageables, compte tenu des volumes et du poids que cela représente. 

Le représentant de l’ADEME a également pointé du doigt le retard structurel des équipements, le déficit d’ingénierie, les difficultés de gouvernance locale de la gestion des déchets et la faiblesse de certaines collectivités en termes de capacités de fonctionnement. « Le coût de gestion des déchets est en moyenne 1,7 fois plus important dans les Outre-mer que dans l’Hexagone, à hauteur de 163 euros par habitant et par an en Outre-mer contre 93 euros en métropole », a-t-il déploré.

 

PM