EXPERTISE. Santé : Le Moringa, une pharmacie à portée de main des Outre-mer

EXPERTISE. Santé : Le Moringa, une pharmacie à portée de main des Outre-mer

Que ce soient les feuilles, les fleurs, l’écorce, les gousses ou les amandes, chaque partie du moringa a trouvé sa place dans la nutrition et la pharmacopée traditionnelle des Outre-mer. Dans cette nouvelle expertise, la Guadeloupéenne Suzie Zozio, docteur Biochimie spécialisée en Science des aliments, nous détaille les nombreuses vertues de cette plante originaire du sous-continent indien, qui a trouvé sa place dans la flore de nos Outre-mer, de La Réunion (« mouroum ») à la Polynésie, en passant par les Antilles et la Nouvelle-Calédonie. 

Dans la seconde moitié du 19ème siècle, la Guadeloupe voit débarquer des milliers de travailleurs venus d’Inde pour maintenir la production de sucre de canne.  Ils arrivèrent également avec des plantes et des épices aux extraordinaires vertus thérapeutiques qui ont coloré le paysage culinaire des Antilles.

Parmi ces plantes, il y a le moringa (Moringa oleifera) encore appelé « arbre de vie » en raison de ses larges vertus nutritionnelles et thérapeutiques. Les indiens de Guadeloupe le nomment « Moundéka » ou « Moulinkilé ».

Longtemps méconnu, le moringa a fini par trouver sa place dans le jardin créole. Il pousse sans la moindre difficulté. Une branche mise en terre donne un arbuste au bout de 2 mois seulement. Les différentes parties de l’arbre (Feuilles, fleurs, écorces, gousses, amandes) sont utilisées pour ses pro­priétés antioxydante, anti-inflamma­toire, antidiabétique, hypotensive, antimicrobienne et anticancéreuse. Avec un profil nutritionnel aussi complet, le moringa est considéré comme étant une nouvelle arme contre la malnutrition.

En effet, les feuilles fraîches contiennent 2 fois plus de protéines que le lait et 8 fois plus que le yaourt, 4 fois plus de calcium que le lait, 25 fois plus de fer que les épinards (28 mg de fer dans 100 g de feuilles), 63 fois plus de potassium que le lait et 3 fois plus que la banane, 36 fois plus de magnésium que l’œuf, 4 fois plus de vitamine A que les carottes, 7 fois plus de vitamine C que l’orange, 4 fois plus de vitamine B que la viande de porc,  6 fois plus de vitamine E que l’huile de colza, et 30 fois plus d’acide aminés que le riz brun.

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Les feuilles sont également utilisées en tisane ou cuites puis mélangées à des épices tels que les graines à roussir, ail, oignon, piments doux pour ensuite être consommées avec du riz. Inutile de rajouter des protéines car les feuilles renferment environ 20 grammes de protéines hautement digestibles et 10 milligrammes d’acides aminés. Elles sont également riches en minéraux (calcium, potassium, fer, zinc, magnésium…).

Remarquablement, les caroténoïdes essentiels à la santé des yeux (Lutéine et Zéaxanthine) ne manquent pas à la liste très longue des molécules thérapeutiques retrouvées dans les feuilles. Citons tout de même, les composés anti-cancéreux : les fameuses molécules soufrées : les isothiocyanates, également retrouvées dans les crucifères, sans oublier les tanins, les stérols, les flavonoïdes et acides phénoliques qui confèrent à cet arbre de vie ces propriétés extraordinaires. Les études scientifiques ont démontré que les feuilles auraient un potentiel antioxydant supérieur à de nombreux fruits rouges tels que les fraises connues pour leurs teneurs élevées en antioxydants.

D’autres études ont mis en évidence que la consommation de moringa pouvait améliorer certains marqueurs biologiques tels que la glycémie à jeun, la glycémie post-prandiale, le cholestérol total, LDL, HDL ainsi que les triglycérides. Les feuilles de moringa sont sans danger et peuvent être consommées fraîches, cuites et conservées sous forme de poudre séchée pendant de nombreux mois sans perte de valeur nutritive.

Les fleurs comestibles et riches en acides gras monoinsaturés peuvent agrémentées à merveille une salade composée grâce à son goût légèrement piquant.

Riche en fibres, les gousses vertes se mangent en les cuisant à la vapeur, en les rajoutant dans les lentilles, les plats en sauce ou encore dans le fameux colombo. Les gousses sont également un condensé de nutriments et de molécules actives : Protéines, minéraux, caroténoïdes, molécules anti-inflammatoires et antioxydantes, acides gras insaturés…

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Lorsque les gousses de moringa arrivent à maturité, elles se dessèchent. A l’inté­rieur de ces gousses se dissimulent des graines qui renferment une amande blanche. L’amande est consommée pour ses propriétés antimicrobiennes et hypotensives et son effet de stimulation du système immunitaire notamment. Toutefois, les graines ont un goût très amer et peuvent entrainer des troubles digestifs lorsqu’elles sont ingérées en trop grande quantité.

Avec 30 % d’huile, les graines sont utilisées pour fabriquer une huile très efficace en cosmétique pour traiter les problèmes de peau et de cheveux.

Une autre propriété intéressante : les graines de moringa sont utilisées pour purifier l’eau grâce aux propriétés absorbantes et antimicrobiennes. Ce pro­cédé est déjà utilisé par les habitants de l’état de Ceará (Brésil) pour purifier l’eau. Pour cela, il suffit de placer trois graines broyées dans un petit sac à thé dans un récipient contenant 1 litre d’eau durant 6h.

Encore une fois, la nature nous montre combien elle peut prendre soin de nous… La recette est simple, une dose de prévention, un soupçon de connaissance et une pincée d’émerveillement pour notre biodiversité.

Docteur Suzie Zozio

-Docteur en biochimie spécialisée en science des aliments
-Fondatrice du laboratoire EUBYOSE
-Fondatrice de la marque d’aliments santé KALOUKAERA FOOD
-Créatrice du magazine KRISALYDE, les sciences décodées pour votre santé
-Responsable des programmes SANTÉ PEYI

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